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À propos

Les Erinyes, filles du désespoir

 

 

Un groupe de lycéens confronté à la violence et à la haine se débat pour exister et grandir. Marija a été droguée et violée en soirée par trois garçons. Roza lutte contre ses pulsions violentes et suicidaires. Dane se drogue et se bat. Ivan est passé à tabac parce qu’il est homosexuel. Martin, qu’il aime, a du mal à assumer cette relation. Sanjin est accro à la pornographie. Le viol a été filmé et diffusé sur les réseaux sociaux. Ce soir-là, Sanjin filmait.

Les Erinyes, persécutrices représentées par trois jeunes filles du lycée, se chargent de dénoncer et de punir ce que la bonne société dénonce comme des travers condamnables selon « les lois de l’Etat et les lois du ciel ». Finalement, ce viol devient l’occasion d’une prise de conscience et d’une sortie de l’adolescence : l’amour l’emporte sur la bêtise.

Dino Pesut est né en 1990 à Sisak, en Croatie. Diplômé de l’Académie des arts dramatiques  de Zagreb, il travaille comme dramaturge et metteur en scène dans différents pays européens. Ses textes ont notamment été présentés au Théâtre national de Split, au Theatertreffen à Berlin et à la Mousson d’été. Il a obtenu de nombreux prix prestigieux; en 2019, il est accueilli en résidence au Royal Court Theatre de Londres. (Quatrième de couverture)

Voici quelques extraits de la préface de Lada Kastelan :

« (…) Ses textes regorgent de références inter textuelles, musicales, pop-culturelles, mais aussi complètement locales qui surgissent dans le rythme rapide de ses pensées, en points spirituels – car oui, Dino Pesut est un auteur extrêmement spirituel, souvent auto-ironique.

Mais tous ces procédés formels ne servent qu’un seul but pour Pesut, le rapprocher de ses thèmes constants, inépuisables, authentiques, pour lesquels il s’est proclamé une voix de sa génération, à savoir les milléniaux (millénials, en anglais).

Ecoutons Pesut lui-même : « J’écris sur ce qui me préoccupe, ce à quoi je pense, ce que je vis et ce à quoi je suis prêt à me confronter. Mon imagination est parfois limitée et je n’ai jamais osé écrire sur quelque chose que je ne crois pas comprendre. Bien sûr, au fil des ans, mes sujets, mes perspectives et mes objectifs se sont élargis grâce à l’expérience de la vie. Et cette question générationnelle, qui est facile à rattacher, c’est en fait le contexte politique, économique et, pourrait-on dire, idéologique des personnages. La plupart de mes textes parlent d’une certaine forme de croissance ou d’amitié. Je pense que ce sont mes thèmes principaux. »

La croissance et l’amitié.

C’est exactement le thème du drame imprimé dans cet ouvrage. La manière dont les limites de sa propre maturité et de sa loyauté envers ses amis sont interpellées dans une situation extrême teste la force de l’amour dans le conflit avec la peur, la force de l’espoir dans le combat contre le désespoir.

Il s’agit ici d’un groupe de lycéens confrontés à une situation où quatre vidéos montrant le viol d’une amie sont diffusées dans l’école. Ils ne savent pas ce qui lui est arrivé. Ils ne savent pas comment s’y prendre. Pas même avec eux-mêmes. Ils se retrouvent dans les toilettes de l’école, au rythme de pauses plus ou moins longues. Ils sont furieux, impuissants, désemparés. Désespérés. Leurs rafales de monologues sont entrecoupées de dialogues, jusqu’au long monologue final, dans lequel la fille violée s’exprime pour la première fois. Ou ne s’exprime-t-elle pas ? L’espoir a-t-il vaincu le désespoir, ou non ?

Dans tous les cas, trois jeunes filles méchantes avec des chignons sur la tête s’en réjouissent – Les Erinyes. La peur et l’amour, le désespoir et l’espoir sont les coordonnées de tous les textes de Pesut.

Quand elle fut écrite, à Zagreb, en 2015, le titre de cette pièce était 4 VIDEOS, sous-titre tragédie lycéenne. Bientôt, cependant, elle a changé son nom en Les Erinyes, filles du désespoir, liée à deux autres textes dramatiques, écrits à Berlin, et est devenue la première partie de la trilogie d’Olympiastadion. Ils étaient liés par le désespoir. La deuxième partie de la trilogie s’intitule Pythia, la dictature du désespoir, et la troisième est XOXO, le désespoir. C’est le désespoir qui se manifeste de différentes manières, auquel nous résistons avec différentes stratégies, qui recule puis nous submerge à nouveau.

La trilogie d’Olympiastadion a reçu un prix en 2017, elle a été créée en 2019, dans une traduction slovène, à Ljubljana, mais ses trois parties semblent n’avoir pas été encore écrites, comme si elles témoignaient d’une époque de perturbations tectoniques qui arrivent sans cesse. On ne sait toujours pas avec quelles conséquences. Ni qui gagnera au jeu de l’élastique que l’espoir et le désespoir jouent au-dessus de nos têtes.

Mais ce que je vois maintenant, c’est que le désespoir joue à l’élastique avec l’espoir….

Un auteur à suivre, assurément.

Véronique Hotte 

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